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Pierre Bonnard, Lac dans le Dauphiné, 21 x 40,5 cm, v. 1916.

Pierre Bonnard (1867-1947) passe de nombreux étés dans sa propriété familiale du Grand-Lemps, « Le Clos », où il retrouve sa mère, sa sœur Andrée, son beau-frère le compositeur Claude Terrasse et leurs cinq enfants.

Pierre Bonnard fumant la pipe dans le jardin du Grand-Lemps, v. 1906, Photo (C) RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski

Dès les années 1887-1888, alors que Bonnard est âgé de 20 ans, et bien que citadin et parisien, il commence par peindre ces paysages baignés de la lumière du Dauphiné[1]. Les collines de cette campagne sauvage et solitaire, les champs aux abords de la maison ou encore les montagnes à l’horizon…

C’est dans cette terre de l’enfance que vont voir le jour de magistrales compositions décoratives aux lumières vaporeuses, illustrant à la fois l’intimité familiale et l’engagement de Bonnard auprès des peintres nabis, un mouvement artistique postimpressionniste. L’artiste se souviendra longtemps des premières sensations vécues dans ce paradis terrestre. La sensibilité du peintre, l’attention constante qu’il portera aux enfants tout comme son affection indéfectible pour les animaux naissent véritablement dans le Dauphiné. Bonnard n’aura de cesse de réinterpréter dans sa peinture l’éden isérois et le bonheur de vivre au Grand-Lemps.

Cette toile intitulée Lac dans le Dauphiné, frangée de végétation au premier plan, montre une subtile alliance de couleurs hardies, où le vert-jaune des prairies dialogue avec le ciel bleu légèrement teinté de rose et annonce déjà les accords audacieux de couleurs qui s’affranchiront plus tard des lois naturelles pour se soumettre à celles du tableau.

Comme l’écrit Antoine Terrasse, « ces petites toiles nous montrent les maisons du bourg et les châteaux des environs, Virieu, le lac de Paladru, les montagnes dans le lointain et le bec de l’Échaillon ; plus larges que hautes, elles font songer à Corot par le jeu des harmonies et des valeurs – cette perception très sensible, la notation très fine des ombres et des lumières[2] ».

Le sentiment de la nature, cette profonde empathie pour les paysages et la sensibilité aux variations atmosphériques de Bonnard prendront racine dans cette terre dauphinoise qui lui est chère.


[1] Petit Paysages du Dauphiné, v. 1888, huile sur toile, 21 x 26 cm, collection particulière, Fontainebleau.

[2] Antoine Terrasse, Pierre Bonnard, Paris, Gallimard, 1967 (reed. 1988), p. 15.

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