Né à Gap en 1948, Francis Masse, dit Masse, a étudié le dessin et la sculpture aux Beaux-Arts de Nancy puis de Grenoble avant de se tourner vers l’animation et la bande dessinée. Il publiera d’ailleurs certains de ses titres aux éditions Glénat.
À partir des années 1990, il retourne aux arts plastiques et notamment à la sculpture. Son univers à la fois érudit et décalé, déjà présent dans ses graphismes, transparaît ici dans une œuvre atypique représentant une chèvre au squelette métallique dont seule la tête et la queue sont identifiables.
Animal récurrent du bestiaire artistique, la chèvre est présente dès la préhistoire dans les grottes ornées puis sous l’Antiquité comme un être hybride avec le dieu Pan et les satyres ou encore au Moyen-Âge avec les chimères. Accompagnée d’une jeune fille, elle apporte une dimension bucolique dans les peintures des XVIIIe et XIXe siècles avant d’être reprise par les grands artistes du XXe siècle, Jean Cocteau, Emmanuel Frémiet ou encore Picasso.
Outre l’aspect bucolique et champêtre, ces représentations rappellent également la dimension nourricière de l’animal. En effet, dans la mythologie grecque, la chèvre Amalthée est celle qui nourrit Zeus enfant. Dans la mythologie nordique, la chèvre Heidrun nourrit les guerriers d’Odin avec son lait composé d’hydromel. En temps de peste en Occident, la chèvre fut utilisée pour nourrir les orphelins dont les mères avaient péri de maladie.
C’est à tous ces éléments que Masse fait probablement référence avec cette sculpture. S’emparant de formes du passé et du présent, il les assemble pour créer une œuvre contenant son propre langage. En suggérant le corps de l’animal avec de simples armatures métalliques, Masse retire cependant à la chèvre ses attributs nourriciers pour en faire une gardienne de la terre, veillant ici sur le jardin du couvent Sainte-Cécile.